Les monnaies numériques peuvent-elles remplacer la monnaie traditionnelle ?

Le développement du secteur de la monnaie numérique soulève de nombreuses questions. L’une des plus sensibles est : les « nouvelles » monnaies numériques vont-elles remplacer la finance traditionnelle ? Aujourd’hui, nous allons tenter d’y répondre. C’est parti !

Comment les devises numériques bousculent-elles la banque traditionnelle ?

Le monde de la monnaie évolue plus vite que jamais. Depuis des décennies, les banques traditionnelles étaient la porte d’entrée du système financier : paiements, crédits, épargne passaient par elles. Mais aujourd’hui, des millions de personnes effectuent leurs transactions via des applications plutôt que dans des agences physiques.

Les fintechs, les cryptomonnaies et les monnaies numériques de banque centrale (MNBC/CBDC) ébranlent le monopole des banques. Le Fonds monétaire international note : « La monnaie numérique pourrait changer la façon dont les banques centrales gèrent la circulation monétaire et interagissent avec les citoyens. »

La question n’est plus « La monnaie numérique est-elle le nouveau grand sujet ? », mais « Sera-t-elle capable de remplacer la monnaie traditionnelle ? »

Limites de la monnaie traditionnelle

Le système monétaire traditionnel présente de nombreuses contraintes, particulièrement visibles à l’ère numérique :

• Lenteur des virements internationaux. Un transfert d’argent entre pays peut encore prendre plusieurs jours.

• Frais élevés. Les transferts internationaux peuvent coûter des dizaines de dollars. Selon la Banque mondiale, le coût moyen d’un transfert transfrontalier au premier trimestre 2025 était de 6,49 %.

• Inégalités financières. Plus de 1,4 milliard de personnes n’ont toujours pas de compte bancaire, faute d’accès ou de possibilité d’utilisation.

• Dépendance aux intermédiaires. Presque chaque transaction passe par des intermédiaires (banques, centres de traitement, SWIFT ou Visa). Ils contrôlent l’accès au système, prélèvent des frais et peuvent retarder ou bloquer des opérations selon leurs règles internes.

• Manque de souplesse. Les monnaies nationales s’intègrent mal aux services numériques modernes et les règlements internationaux dépendent de SWIFT et des réseaux de correspondants.

• Manque de transparence. Les clients savent rarement comment leurs dépôts sont réellement utilisés ou quelle est la solidité de leur banque. Les crises de 2008 et 2023 ont montré que même de grandes institutions peuvent faire faillite, privant les déposants de l’accès à leurs fonds. À l’inverse, la blockchain offre un modèle plus transparent : toutes les transactions sont inscrites dans un registre public et les utilisateurs gardent le contrôle direct de leurs fonds, sans intermédiaires.

Avantages et inconvénients des monnaies numériques

Si la finance traditionnelle paraît datée, examinons les monnaies numériques et comparons leurs forces et leurs faiblesses.

Qu’est-ce qu’une MNBC (CBDC) ?

Nous avons évoqué les MNBC ; détaillons le sujet.

La MNBC (Monnaie Numérique de Banque Centrale — Central Bank Digital Currency, CBDC) est une forme numérique de la monnaie nationale, émise par une banque centrale. Elle a la même force légale que le cash, mais n’existe qu’au format électronique. En substance, c’est la tentative de combiner la fiabilité de la monnaie d’État avec la rapidité des blockchains privées.

Pour les banques centrales, ces devises sont devenues un axe stratégique : elles permettent de préserver la souveraineté monétaire face à la montée des cryptos et des stablecoins, d’offrir une alternative numérique sûre et prévisible, et de moderniser l’infrastructure des paiements (transferts plus rapides, moins chers, plus transparents). Les MNBC ouvrent la voie à l’argent programmable — exécuter des transactions automatiquement selon des conditions prédéfinies, avec des flux financiers entièrement traçables et pilotables.

Elles peuvent aussi aider à lutter contre la corruption et les détournements de fonds publics : chaque transaction est inscrite sur une blockchain contrôlée et traçable de la source au destinataire final. Ce niveau de transparence permet aux banques centrales et aux régulateurs de suivre l’utilisation des fonds et de prévenir les flux illégaux — chose souvent impossible dans les systèmes traditionnels.

Bref, les MNBC ne sont pas qu’un instrument de paiement de plus, mais une nouvelle architecture de monnaie numérique par laquelle les États cherchent à tirer parti de la blockchain pour renforcer la stabilité, la transparence et l’efficacité des systèmes financiers de demain.

Comment les pays utilisent-ils les monnaies numériques aujourd’hui ?

Selon les données de la Banque des Règlements Internationaux (BRI), 134 pays représentant 98 % du PIB mondial étudient ou testent des MNBC en 2025. Exemples :

• Chine. Le pays est leader. Fin 2025, on compte ~260 millions de portefeuilles personnels enregistrés ; le volume cumulé des transactions en yuan numérique atteint ~7,3 billions de yuans (~1 billion USD).

• Union européenne. La BCE prépare le lancement de l’euro numérique d’ici 2028, en soulignant qu’il complétera, et non remplacera, le cash.

• Brésil. Le gouvernement teste Drex, une version numérique du réal intégrée aux comptes bancaires et aux protocoles DeFi.

• Nigeria. Premier pays africain à lancer une MNBC. Malgré une adoption initiale faible, l’eNaira est déployée dans les paiements publics et les transports.

• Japon. La Banque du Japon a achevé la phase 2 des tests du yen numérique, axés sur la confidentialité et les paiements hors ligne.

• États-Unis. La Réserve fédérale explore le dollar numérique mais souligne les risques de « contrôle centralisé » et les menaces pour la stabilité bancaire.

Parallèlement aux MNBC adossées aux États, les cryptos sont déjà utilisées partout comme argent numérique sans frontières. Bitcoin, Ethereum et des stablecoins tels qu’USDT et USDC permettent des transferts rapides et peu coûteux, en dehors des circuits traditionnels. Pour des millions de personnes — notamment dans les pays en développement — la crypto est un outil financier pratique, accessible partout avec une simple connexion Internet, et une alternative aux devises nationales pour le commerce transfrontalier, l’épargne et les transferts.

Les cryptomonnaies sont-elles la monnaie du futur ?

Les monnaies numériques — qu’il s’agisse de Bitcoin, des cryptos en général, ou des MNBC — ne sont plus un simple test : elles font partie de la réalité financière mondiale. Toutefois, dans les prochaines années, elles ne remplaceront pas totalement la monnaie traditionnelle ; elles la transforment. La crypto conservera son rôle d’actif d’investissement et de moteur technologique, tandis que les MNBC deviendront la forme numérique officielle du fiat, alliant stabilité bancaire et flexibilité de la blockchain.

L’avenir de la monnaie sera hybride : cash, comptes bancaires, stablecoins et monnaies numériques d’État coexisteront et se compléteront. Pas une révolution, mais une évolution — ainsi se fera probablement la transition du papier vers ses successeurs numériques.

Notre article vous a-t-il été utile ? Pensez-vous que la monnaie numérique puisse remplacer la monnaie traditionnelle ? Pourquoi ? Discutons-en !